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Vallotton le soleil ni la mort – Colette Nys-Mazure

vallotton-629x1024In extremis j’apprends que Colette Nys-Mazure est belge. De quoi me saisir de ce petit ouvrage illustré avant la fin du mois d’avril. Il traîne derrière plusieurs rangées de livres depuis… la dernière rétrospective sur le peintre Vallotton à Paris soit pendant l’hiver 2013 – 2014 – exemple typique de l’achat compulsif.

La collection Ekphrasis des éditions Invenit est une petite merveille découverte chez mon libraire préféré. Elle rassemble en de courts volumes deux artistes : un peintre et un écrivain. Ici, Colette Nys-Mazure est invitée à écrire ce que lui inspire le tableau Le ballon de Félix Vallotton, peint en 1899. A partir de descriptions littéraires du tableau et des sentiments contradictoires qu’il évoque, l’auteur se remémore des souvenirs personnels et douloureux de son enfance, entre ombre et lumière, entre vie et mort, enfance et âge adulte. Elle accommode l’ensemble de quelques vers, et renvoie aux écrits littéraires du peintre, en particulier au roman La vie meurtrière. Elle part du Ballon et se permet des écarts vers tout ce qu’il lui inspire de manière a priori désordonnée mais fondamentalement cohérente. Elle se joue des genres, du commentaire à la description, de la poésie au récit romancé, de la biographie distante aux souvenirs d’enfance, et manie le style avec élégance.

Vallotton le soleil ni la mort est une très belle entrée en matière pour découvrir à la fois la peinture de Félix Vallotton et l’écriture de Colette Nys-Mazure.

Enfance fracassée

Un deux trois j’ai vu !, Cache-cache approche, Au mouchoir, Balle au chasseur, Mots de passe, Marelle entre enfer et paradis. Rondes entraînantes des petits, ravis par le jeu, au fort du plaisir. On s’amuse à se faire peur en évoquant fantômes et brigands pour mieux les exorciser. Intrépidité de l’enfance. Son audace fait fi des dangers. Son inconscience même la défend et s’avère souvent plus efficace que la prudence frileuse. Une autre sphère.

Pourquoi nous en éloigner à l’âge adulte ?

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Le ballon – Félix Vallotton, 1899, Musée d’Orsay


Vallotton le soleil ni la mort – Colette Nys-Mazure
Invenit, (collection Ekphrasis), 2013, 67 p.


Challenges concernés

Challenge Multi-défis 2016 :
Un livre dont le titre comprend une conjonction de coordination

Soie – Alessandro Baricco & Rébecca Dautremer

ob_3fba28_soieCher Destinataire,

J’ai quelques très beaux livres dans mes étagères, les deux premiers opus des éditions Tishina en font partie. Je te parlais du premier Le soleil des Scorta ici. A l’occasion d’une rencontre avec le dessinateur Benjamin Bachelier et l’éditeur de Tishina à la librairie Vivement Dimanche, j’en avais profité pour acheter Soie revisité par Rébecca Dautremer. Je l’ai lu il y a quelques mois, il est magnifique évidemment. Les éditeurs de Tishina prennent toujours soin de sélectionner des textes qui les ont marqué, ils recherchent ensuite un dessinateur qu’ils apprécient et lui donnent carte blanche pour adapter le texte à leurs envies. S’en suit un très gros travail d’éditorialisation, de choix du papier, des couleurs, d’impression. Le produit final, aussi bien pour Soie que pour Le soleil des Scorta est toujours remarquable.

Pour en revenir à Soie, ce roman raconte l’histoire d’Hervé Joncour, il vit dans le sud de la France avec sa femme Hélène Joncour, et pour gagner sa vie il cultive les vers à soie dont il ramène les œufs du Japon. Nous sommes dans la deuxième moitié du XIXème siècle. Le voyage qu’il entreprend chaque année dure plusieurs mois, et chaque voyage est l’occasion d’étranges rencontres avec le vendeur d’œufs et la femme qui l’accompagne. Je ne sais pas, cher Destinataire, si tu as déjà lu un roman d’Alessandro Baricco. Son écriture est très particulière : par exemple, j’avais lu Océan mer sur les conseils de mon amie Cyve, c’était la première fois que je lisais un roman aussi halluciné, déconnecté de la réalité, dans mon souvenir il est comme flottant hors du temps humain. Soie est un peu plus réaliste, mais j’y retrouve cette distance : le protagoniste observe sa vie, il vit des aventures remarquables pour son époque et ne semble pas s’en soucier, il est parfois surpris ou intrigué, mais se pose finalement toujours en observateur. Je trouve l’effet produit extrêmement apaisant.

soie-film-5328Je me demande tout de même comment j’aurais vécu ce livre, si je ne l’avais pas lu à travers l’interprétation de Rébecca Dautremer. Son empreinte est si forte ! Rien que la couverture avec l’homme japonais tatoué nous entraîne déjà très loin du sud de la France, je crois que si j’avais lu ce roman « seule », le Japon ne m’aurait pas autant marqué. Et puis je me demande comment j’aurais compris Hélène, est-ce que je me serais identifiée à elle ? Est-ce que j’aurais essayé de la comprendre ? Je l’ai sentie tellement secondaire, soumise et discrète, dans le dessin de Dautremer, contrairement au film réalisé en 2007 par François Girard, que j’ai vu dans la foulée et dans lequel elle tient le premier rôle, belle et affirmée, face à un Hervé Joncour beaucoup plus effacé. L’association du coup de crayon de Rébecca Dautremer et de la plume d’Alessandro Baricco apporte également une touche érotique à l’ensemble qui n’est pas non plus pour me déplaire. Je ne me souviens pas que cette dimension ait été aussi présente dans le film – mais je ne me souviens jamais des films. Décidément, si j’ai adoré ce récit, cette lecture illustrée m’interroge bien d’avantage sur les différentes interprétations possibles.

Je me dis aussi, qu’il faudra que je lise les autres romans d’Alessandro Baricco, quel auteur étonnant ! L’as-tu déjà lu ?

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Soie – Alessandro Baricco et Rébecca Dautremer, traduit de l’italien par Françoise Brun
Tishina, 2012
Première traduction française : Albin Michel, 1997
Première publication : Seta, 1996


Challenges concernés 

Challenge Multi-défis 2016 : Un livre avec une usurpation d’identité

Ruy Blas – Victor Hugo

couv61289954Oulala ! La date limite pour notre lecture commune de Ruy Blas était fixée au 10 décembre… Je ne suis pas encore en retard, mais il s’en est fallu de peu.

Je dois admettre que j’ai attendu le dernier moment avant de me procurer une vieille édition de préparation au bac de Ruy Blas, la motivation plutôt en berne… J’ai un lointain souvenir d’exercice scolaire sur ce titre qui m’avait laissé de marbre. La lecture des premières pages de la pièce s’est d’ailleurs avérée assez fastidieuse… Franchement, vous avez vu les trésors que recèlent mes étagères, pourquoi m’astreindre à ces vieilleries conventionnelles ?

Trève de mauvaise foi ! Passée la pemière scène et malgré mon déplorable manque d’intérêt pour la lecture des pièces de théâtre, j’ai retrouvé l’immense plaisir des vers de Victor Hugo… quitte à passer pour vieille et conventionnelle ! J’ai adoré les épanchements amoureux de Ruy Blas envers la reine, j’ai ris des péripéties de Don César, j’ai frémis des projets de Don Salluste.. et j’aurais presque pleuré du sort final… Pour en pleurer tout à fait, il me faudrait voir jouer la pièce.

Cette belle expérience de lecture ne me réconcilie pas encore complètement avec le théâtre. Il faudra certainement me bousculer à nouveau pour que j’accepte de faire tomber mes appréhensions et que je priorise ce type de lecture. Toutefois, je dois admettre qu’épisodiquement, j’apprécie de me plonger dans ce genre littéraire, par curiosité, histoire de ne pas le perdre complètement de vue.

A ma décharge, j’adore me rendre au théâtre, en vrai !, et j’apprécie tout particulièrement le théâtre d’improvisation, celui qui ne se lit pas ! 😉

Retrouvez les billets de Claudialucia, Nathalie, Laure, et bientôt Miriam.


Ruy Blas – Victor Hugo
Nathan, 1996, 263 p.
Première publication : 1838


Challenges concernés 

Eugénie Grandet – Honoré de Balzac #lectureaudio

Le temps passe et mes chroniques tardent… L’hiver dernier j’ai emprunté et écouté une version audio d’Eugénie Grandet. Je possède pourtant le livre papier – que je n’ai jamais lu – mais j’ai voulu tenter à nouveau l’aventure auditive, « à l’envers » cette fois, en commençant par l’écoute.

Les simples titres des différentes plages de lecture ont bien failli m’y faire renoncer. Il ne s’agissait pourtant que de début de phrase de l’extrait annoncé, mais ces quelques mots listés au hasard des paragraphes sur la pochette du CD m’ont fait prendre conscience de l’écriture de Balzac… et j’ai longuement hésité avant d’entreprendre l’écoute au risque de me gâcher une belle lecture traditionnelle, en reprenant mes mains, mon livre de papier et mes deux yeux fatigués. Le repassage, les pommes de terre – ou autres légumes à éplucher – auront eu raison de mon impatience, et j’ai finalement choisi d’insérer le CD dans mon ordinateur…

Le texte lu par Françoise Gillard me saisit immédiatement, et cette écoute est d’avantage une redécouverte de Balzac qu’une lecture expérimentale. Si j’ai lu Le père Goriot au collège, je n’en ai aucun souvenir, ou peut-être celui d’un vague ennui. Ici, j’ai très rapidement oublié le support et je me suis allègrement laissée immerger dans le récit de vie et les mésaventures amoureuses et familiales de mademoiselle Eugénie.

Je n’ai finalement pas lu moi-même Eugénie Grandet et le livre attend toujours dans mon étagère – alors que le CD est retourné depuis longtemps dans les bacs de la BM de Lyon. Je garde cette belle lecture bien au chaud pour le prochain hiver, savourant par avance cette future redécouverte à l’aide de mes yeux éveillés.


Eugénie Grandet – Honoré de Balzac, lu par Françoise Gillard
Editions Thélèmes (format audio), 2007, 5h
Première publication au format papier : 1833


 

Challenges concernés
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