Archives du mot-clé chaîne poétique

Je pense que je ne verrai jamais…

Je pense que je ne verrai jamais
Un poème charmant comme un arbre.
Un arbre dont la bouche affamée est plus
Contre la douce couche de la terre ;
Un arbre qui regarde Dieu toute la journée,
Et lève ses bras feuillés pour prier ;
Un arbre qui peut en été porter
Un nid de merles dans les cheveux ;
Sur le sein duquel la neige a couché ;
Qui vit intimement avec la pluie.
Les poèmes sont faits par des imbéciles comme moi,
Mais Dieu seul peut faire un arbre.

Les arbres, Joyce Kilmer
Merci Nathalie.
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A thing of beauty is a Joy for ever

A thing of beauty is a Joy for ever
Its loveliness increases
It Will never pass into nothingness
But still will keep
A bower quiet for us, and a sleep
Full of sweet dreams and health and quiet breathing
Jonh Keats
Merci Christiane.
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Je suis un gardeur de troupeaux.

IX

Je suis un gardeur de troupeaux.
Le troupeau ce sont mes pensées
et mes pensées sont toutes des sensations.
Je pense avec les yeux et avec les oreilles
et avec les mains et avec les pieds
et avec le nez et avec la bouche.

Pensez une fleur c’est la voir et la respirer
et manger un fruit c’est en savoir le sens.

C’est pourquoi lorsque par un jour de chaleur
je me sens triste d’en jouir à ce point,
et couche de tout mon long dans l’herbe,
et ferme mes yeux brûlants,
je sens tout mon corps couché dans la réalité,
je sais la vérité et je suis heureux.

Le gardien de troupeaux, Fernando Pessoa

Merci Hélèna.

 

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Vague, perdue au fond des sables monotones…

Ville morte

Vague, perdue au fond des sables monotones,
La ville d’autrefois, sans tours et sans remparts,
Dort le sommeil dernier des vieilles Babylones,
Sous le suaire blanc de ses marbres épars.

Jadis elle régnait ; sur ses murailles fortes
La Victoire étendait ses deux ailes de fer.
Tous les peuples d’Asie assiégeaient ses cent portes ;
Et ses grands escaliers descendaient vers la mer…

Vide à présent, et pour jamais silencieuse,
Pierre à pierre, elle meurt, sous la lune pieuse,
Auprès de son vieux fleuve ainsi qu’elle épuisé,

Et, seul, un éléphant de bronze, en ces désastres,
Droit encore au sommet d’un portique brisé,
Lève tragiquement sa trompe vers les astres.

Albert Samain, Au jardin de l’infante

Merci Maude.

 

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Mon cher petit garçon…

Mon cher petit garçon,

T’écrire ces quatre mots me bouleverse. Ils rendent si réel l’homme que tu es, en cet aujourd’hui qui est le tien, quand, dans celui qui est le mien, tu n’es encore qu’un enfant.

Cette lettre je l’adresse donc à l’homme que tu n’es pas encore pour moi, mais que tu es devenu puisque te voilà en train de la lire. Tu l’auras trouvée sans doute par hasard sur cette clé où je consigne en secret les trésors de ton enfance. J’ignore l’âge que tu as, j’ignore ce qu’est devenu le monde, j’ignore même si ces clefs fonctionnent encore mais j’ai espoir que, la découvrant, tu trouveras un moyen de l’ouvrir.

Et par la magie de l’écriture, voici que cette lettre devient la fine paroi qui nous relie, et entre l’aujourd’hui où je t’écris – où tu commences à déchiffrer les phrases, où tu as peur dans le noir, où tu crois à la magie – et celui où tu me lis, chaque mot de ma lettre a gardé sa présence ; si à l’instant j’écris je t’aime, voilà qu’à ton tour, des années plus tard, tu lis je t’aime. Et que t’écrire d’autre que je t’aime, alors que nous vivons ce que nous vivons en ce confinement dont tu n’as peut-être plus qu’un vague souvenir ? Quoi dire de plus urgent que l’amour ?

En ces journées étranges où rode une mort invisible et où le monde va vers son ravin, un ravin qui semble être l’héritage laissés aux gens de ta génération, un père, plus que de raison, s’inquiète pour son fils. Je te regarde. Tu dessines un escargot. Tu lèves la tête et tu me souris. « Qu’est-ce qu’il y a papa ? » Rien mon garçon.

Je ne sauverai pas le monde. Mais j’ai beau ne pas le sauver, je peux du moins te désapprendre la peur. T’aider à ne pas hésiter le jour où il te faudra choisir entre avoir du courage ou avoir une machine à laver. T’apprendre surtout pourquoi il ne faudra jamais prononcer les mots de Cain et, toujours, rester le gardien de ton frère. Quitte à tout perdre. J’ignore d’où tu me lis, ni de quel temps, temps de paix ou temps de guerre, temps des humains ou temps des machines, j’espère simplement que ton présent est meilleur que le mien. Nous nous enterrons vivants en nous privant des gestes de l’ivresse : embrassades, accolades, partage et nul ne peut sécher les larmes d’un ami.

Mais si ton temps est pire que celui de ton enfance, si, en ce moment où tu me lis, tu es dans la crainte à ton tour, je voudrais par cette lettre te donner un peu de ce courage dont parfois j’ai manqué et, repensant à ce que nous nous sommes si souvent racontés, tu te souviennes que c’est la bonté qui est la normalité du monde car la bonté est courageuse, la bonté est généreuse et jamais elle ne consent à être comme une embusquée, qui, à l’arrière vit grâce aux sang des autres. Nul ne peut expliquer la grandeur de ceux qui font la richesse du monde. Donne du courage autour de toi et n’accepte jamais ce qui te révulse.

Quant à moi : je t’aime. Ton père t’aime. Sache cela et n’en doute jamais.

Ton père.

Wajdi Mouawad

Merci Carole !

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Est-il mort déjà…

Est-il mort déjà le tournoyant pétale,
qui se détache et tombe ?
Ou meurt-il seulement lorsqu’il touche la terre ?
Extrait de Marche forcée de Miklos Radnoti
Merci Patrick
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Elle s’accroche partout…

Elle s’accroche partout,
Aux murs, sur un fil,
Se faufile dans les interstices
S’entremêle avec celles et ceux qui l’entourent.

Bientôt elle laisse s’échapper
De douces pétales violacées
Qui viendront tapisser le sol

Se déploient alors avec majesté
Des feuilles d’un vert pâle
Qui vont former de grandes lianes
Et grandir jusqu’à toucher le ciel

Elles permettront l’été venu
De s’abriter du soleil brûlant
Et de profiter ainsi
D’une liberté retrouvée

Je me nomme la glycine

 

Merci Franck !

 

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Dans les ténèbres qui m’enserrent…

Dans les ténèbres qui m’enserrent,
Noires comme un puits où l’on se noie,
Je rends grâce aux dieux quels qu’ils soient,
Pour mon âme invincible et fière.

Dans de cruelles circonstances,
Je n’ai ni gémi ni pleuré,
Meurtri par cette existence,
Je suis debout bien que blessé.

En ce lieu de colère et de pleurs,
Se profile l’ombre de la mort,
Je ne sais ce que me réserve le sort,
Mais je suis et je resterai sans peur.

Aussi étroit soit le chemin,
Nombreux les châtiments infâmes,
Je suis le maître de mon destin,
Je suis le capitaine de mon âme.

Invictus, de William Ernest Henley, écrit en 1888

Merci Claire.

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