La vérité sur l’affaire Harry Quebert – Joël Dicker

la_verite_sur_l_affaire_harry_quebert« Êtes-vous trop snob pour aimer Joël Dicker ? » telle est la question soulevée par je-ne-sais-plus-quelle-blogueuse (désolée !) concernant La vérité sur l’affaire Harry Quebert. De toute évidence, ma réponse est oui. J’ai déjà honte de ce qui va suivre. Ce livre m’a été offert pour mon anniversaire, et j’ai beau réfléchir à toutes les nuances qui pourront agrémenter mon propos, je sens ma mauvaise langue et ma foi de vipère remonter inévitablement à la surface. Autant vous prévenir, si vous n’avez pas encore lu La vérité sur l’affaire Harry Quebert et que vous envisagez de le faire, n’avancez pas plus loin dans cet article. J’en dirai certainement beaucoup trop sur le déroulé de l’action.

Pour commencer, lorsque j’ai ouvert mon joli paquet postal, j’ai d’abord été surprise par son contenu : un polar et un livre de science-fiction, deux genres ne faisant partie de mes lectures que de manière très marginale. « Pourquoi pas – me dis-je – voilà de quoi me faire découvrir de nouveaux horizons ! ».

Soutenue par la pression médiatique, j’ouvrais en premier lieu La vérité sur l’affaire Harry Québert. Si je savais ne pas devoir m’attarder sur le style de Joël Dicker, comme promis par de nombreux blogueurs j’ai toutefois été rapidement entraînée par l’intrigue. Les premiers jalons posés – les premières caricatures aussi ! – je me suis surtout laissée porter par les blagues disséminées ici ou là me rappelant l’humour tapageur de l’ami à l’origine du présent. Celles-ci m’ont joyeusement portée pendant quelques 200 ou 300 pages… puis Nola est entrée en scène, ou plus exactement le récit de sa vie et de son aventure avec Harry Quebert, et j’ai alors sérieusement commencé à déchanter.

Quelle mièvre histoire d’amour… quelle sordide histoire de pédophilie entre un écrivain attardé et une enfant folle à lier… sans parler des autres hommes décérébrés de la ville d’Aurora ! Pendant les quelques premières centaines de pages, j’imaginais Nola, certes jeune, mais mâture et femme dans sa manière d’être, surtout pas une enfant schizophrène ! Comment faire avaler au lecteur qu’une histoire d’amour saine est possible entre une enfant malade de 15 ans et un homme adulte de 34 ans ? S’il est difficile d’anticiper précisément la chute du roman, l’épisode de la fellation au chef de police dans le but de protéger l’homme aimé mettait largement le lecteur sur la piste du dérangement psychologique… Après plusieurs centaines de pages d’un ennui mortel où l’auteur brode autour d’une histoire d’amour perverse en copiant-collant littéralement ses propres textes sous prétexte d’effet de style pour dévoiler chaque fois un peu plus de détails de l’enquête, le dénouement s’amorce enfin et le récit s’accélère un peu. Je ne peux même pas reconnaître avoir été tenue en haleine tout au long de cette chute dramatique qui n’en finit pas de chuter. J’ai survolé les dernières pages, pressée d’en finir avec cette ultime ligne droite. Si j’ai terminé ce livre, c’est uniquement parce qu’on me l’a offert et parce que j’espérais peut-être un dernier rebondissement un peu moins grotesque que les précédents.

Avec un peu de recul, ce livre est à mon sens l’exemple type du roman qui tire sa force de sa forme – courts chapitres, scandale amoureux, fantasmes interdits, style efficace, suspense de comptoir, revirements rocambolesques – mais qui laisse totalement tomber le fonds, le message défendu, la cohérence, la possibilité pour le lecteur de se projeter dans le récit, la véracité des émotions, la subtilité dans les sujets abordés.

Et maintenant ? Est-ce que j’ose publier ce billet incendiaire ? Avec toutes mes excuses – mea culpa maxima – Pardon ! 😦


La vérité sur l’affaire Harry Quebert – Joël Dicker
De Fallois/Poche, 2014, 863 p.
Première publication : De Fallois/L’Âge d’Homme, 2012


Challenges concernés

Lecture commune avec Jostein
Challenge Pavés 2015-2016 sur Babelio
Challenge Multi-défis sur Babelio : un livre traitant d’un secret de famille

32 réflexions au sujet de « La vérité sur l’affaire Harry Quebert – Joël Dicker »

  1. ulostcontrol

    Je n’ai pas lu tout ton article (seulement le premier paragraphe et le dernier) comme je compte le lire un jour, mais je crois que je vois où tu veux en venir et quel ton tu as choisi 😉 J’ai vu énormément d’avis positifs dessus, aussi ça me fait un peu bizarre de voir ton avis et celui de Jostein en donner un avis aussi négatif ! Je crois bien que c’est quitte ou double avec cette histoire… Du coup, je suis curieuse de le lire et de me faire mon propre avis dessus, savoir de quel côté je me range !

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    1. Moglug Auteur de l’article

      En fait, je crois que généralement ceux qui n’aiment pas ne s’attardent pas jusqu’à la 863e page, du coup ils ne publient pas de billet dessus. S’il n’y avait pas eu la lecture commune, je n’aurais sans doute pas pris le temps de publier ce billet. Mais je vois qu’il y a d’autres critiques négatives sur Babelio, et plusieurs commentaires de ce billet montrent bien que le livre ne fait pas vraiment l’unanimité contrairement à ce que laisserait penser l’engouement médiatique. 😉 Ravie de te lire ici dans tous les cas ! 😀

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  2. Lili

    J’ai beau avoir accepté toutes les énormités de ce bouquin et l’avoir dévoré, je suis tout à fait d’accord avec toi : c’est clairement à la littérature ce que les téléfilms de M6 sont au cinéma d’auteurs 😉

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  3. indira95

    ne tente même pas son dernier, Le livre des Baltimore, c’est encore pire 🙂
    pour ma critique de ce livre j’ai eu droit à un bloggeur qui me reprochait comme toute lectrice française qui se respecte de ne pas aimer les auteurs étrangers…

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  4. Anne de Louvain-la-Neuve

    Je suis exactement en phase avec absolument TOUT ce que vous dites et contrairement à ma sœur que j’aime beaucoup et qui a généralement le même avis que moi sur les bouquins, contrairement à mes amies (que je considère encore comme telles) : je peux formuler les mêmes critiques que vous ! Ouf, on se sent moins seule mais j’assume totalement ! Et je n’ai aucune envie de lire le suivant.

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      1. Lady GG

        Eh bien moi je l’ai beaucoup aimé… Et je suis plutôt éclectique dans mes lectures!
        C’est justement cette écriture à l’américaine que j’ai aimé, cette construction bien pensée, rare dans la littérature contemporaine française. Des personnages pas vraiment attachants, un vrai goût de fiction, mais une intrigue bien ficelée, à pas lâcher le livre. J’ai laissé Joël Dicker me balader avec plaisir, en m’interdisant de survoler les dernières pages pour accéder au dénouement! Au fil de ma lecture, j’ai pensé à Twins Peaks, c’est dire! Et Nola… a quelque chose de Lolita, non? En fait ce roman doit beaucoup au cinéma, peut-être.
        Quant à son dernier livre, Les Baltimores, à ne pas lire si on n’a pas succombé au charme solaire de Nola….

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