La Chiquitita, c’est son nom. Celui du personnage qui m’a interpellée à l’instant même où je l’ai rencontré/vu/lu. Je suis de suite tombée amoureuse de l’avant-dernière factionnaire de la maison clause où travaille Hip Hop le narrateur des Chiens de l’aube.
La Chiquitita n’est pourtant qu’un moindre élément, un personnage secondaire parmi d’autres. Elle n’est pas le narrateur, ce vieil intendant de bordel issu d’une quelconque favela d’Amérique latine, elle n’est pas non plus cette « mère supérieure », proxénète en chef et propriétaire des lieux, elle n’est rien de ses consoeurs prostituées amères et acâriatres et non moins femmes, ni de la dernière embauchée fragile et faussement innocente. Elle n’a rien à voir non plus avec la brute épaisse, garde du corps de ces dames, et persécuteur de première ligne du brave concierge.
Les chiens de l’aube est un roman riche en personnages attachants et rebutants. Le comportement anormal de La Faena, la dernière recrue de cette maison clause latino-américaine, est le prétexte assumé pour une immersion dans les souvenirs et dans le quotidien de l’étrange tenancier au surnom instable cité précédemment, ce brave Hip Hop embrigadé (presque) malgré lui dans une enquête des plus cocasses.
Au terme de cette lecture, je vous convie chaudement à partager les jours de ce drôle de bonhomme, et à vous prendre au jeu de ce bordel de quartier aux allures d’entreprise familiale. Et parce que, dans Les chiens de l’aube, la langue compte tout autant que la narration – si ce n’est plus ! – je vous rapporte ci-dessous l’incipit du roman :
« Chez nous, les rues de la nuit appartiennent aux furtifs, aux baveux, aux électriques. Elles appartiennent aux chats pelés qui bondissent des poubelles, crachoteurs d’injures chuintantes, griffes et dents jaillies du fourreau pour défendre la pauvre arête ou la tripaille fétide qui alimentera en eux jusqu’au lendemain la petite braise de vie, étique et obstinée. Elles appartiennent aux lignes de chiens galeux, mangés de tiques, mais forts de leur nombre : masse protéiforme et grondante, capable d’attaquer l’ivrogne branlant ou de faire reculer le jouisseur clandestin filant à son plaisir, feutré, circonspect, concentré dans son effort pour noyer l’ombre qui le talonne dans l’ombre caressante des murs, un ton plus noire. »
Essayez maintenant d’imaginer, après ces quelques lignes à propos de vulgaires bêtes errantes, comment j’aurais pu tenter d’exprimer – pauvre moi – comment je-kiffe-à-donf-truc-de-ouf la si-fabuleuse-merveilleuse-délicieuse Chiquitita !! Rappelons-le celle qui n’est censée être qu’une prostituée de seconde zone, personnage d’arrière-plan du roman…
Les chiens de l’aube – Anne-Catherine Blanc
D’un noir si bleu, 2014, 348 p.
Challenge concerné
(cliquez sur l’image pour les détails)
une belle découverte! Merci!
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Un sujet difficile.
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Certes, mais traité avec humour, finesse et style ! On dépasse largement la situation des « misérables prostituées » pour s’attacher aux personnages tendres ou caractériels. Mais je ne qualifierais pas le tout de difficile, ce n’est pas un témoignage sur la misère des favelas (même si cette dimension est inévitablement présente)…
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Un roman qui se passe dans une maison close… Tu sais trouver les arguments pour me convaincre 😉
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Ahaha ! Tant mieux 😀 Par contre, il n’a rien d’érotique, ce n’est pas le sujet.
Le récit est d’avantage centré sur le quotidien du concierge qui travaille le jour quand ses collègues noctambules se reposent. Cela dit rien que pour le style de l’auteur, ce roman vaut vraiment le coup !
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Ah mais c’est l’auteur de l’astronome aveugle!
Je te le recommande
http://enlisantenvoyageant.blogspot.fr/2011/09/lastronome-aveugle.html
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Aaaaaaaaaaah merci pour le lien ! Je ne connaissais pas ses autres livres mais je ne pense pas être déçue 😉
La maison d’édition D’un noir si bleu vient de faire faillite malheureusement, mais pour se procurer Les chiens de l’Aube, on peut encore d’adresser à l’auteur sur sa page Facebook. Elle recherche justement un nouvel éditeur pour un manuscrit…
C’est triste à pleurer ses éditeurs qui font faillite avec des textes pareils dans leur catalogue… tout ça pour des questions médiatique 😦
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Merci pour le lien au sujet de cet autre livre d’Anne-Catherine Blanc, laissé sur mon 1er blog (sur lequel je ne publie plus d’articles)
Vous me retrouverez sur le 2e blog ici :
http://kimcat1b58.eklablog.com/
Bon We
Béa kimcat
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Merci ! Vous ne publiez plus de chronique de livre sur ce second blog ?
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Excellent roman, comme tous les autres de l’auteure, L’astronome bien sûr, Moana blues (qui a sans doute pour moi un petit avantage), et les nouvelles Passagers de l’archipel
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Merci pour les titres ! Il faudra que j’aille voir tout ça !! Moana Blues, dis-tu ?
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Une auteure que j’avais découverte et que je continuerai à lire
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Est-ce que tu as lu Les chiens de l’aube toi aussi ? Si l’on en croit les messages qu’elle diffuse sur sa page Facebook, Anne-Catherine Blanc a un nouveau manuscrit à publier… Elle cherche un nouvel éditeur.
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